Les mots surlignés font l'objet d'une note
1Monsegneur, je vous ay escrit du XIXe dans un pacquet
2du roy. Lendemain, XXe de ce moys, Michalon arriva devers monsieur
3Bellièvre du matin, qui sur l’heure mesme envoya appeler
4monsieur d’Hourche et moy, et receumes par ses mains votre lettre
5du XVe. Son propoz feut que sur la lettre que je luy avoit présentée
6de votre part du Ve, il ne m’avoit voulu dire la poursuitte où
7il estoit lors de tirer monsieur Truchon du Daulphiné
8en une honorable charge par deça, suivant sa volonté de
9faire mettre monsieur le président Bellievre son frère en son estat
10de premier président, et monsieur de Pressins en celuy de tiers, d’autant
11qu’il vouloit, lorsqu’il s’agissoit de voz mémoires, laisser
12son frère en arrière, et ses propres poursuittes, pour donner
13lieu à voz poursuittes et servir à voz commodités, comme il
14estoit encore en ceste mesme volonté et que du XIXe il estoit
15entré en quelzques propoz avec monsieur le comte de Retz de
16ce premier desseing, mais qu’il n’avoit rien voulu toucher
17de la maladie dudit seigneur Truchon, de peur de nuyre
18à votre poursuitte ; et finablement, puis voz lettres receues
19par ledit Michalon, il n’avoit voulu sortir pour aller au
20chasteau sans nous avoir parlé, et s’estoit résolu avec nous
21du moyen que l’on avoit à y tenir pour votre contentement,
22suivant ce que vous nous escriviés de faire, le tout par son
23advis et considérantz que votre volonté et son premier desseing
24concourroint en ce que monsieur son frère vint en l’estat de
25premier président, et que vous vous contenteriés de pouvoir faire votre
26profit de l’estat de tiers président, et que la sienne aussi
27estoit que prinsiés ce profit de monsieur de Pressins,
28qui avoit volonté d’estre président et bon pouvoir de
29financer, et que davantaige monsieur le comte de
30Retz tiendroit à obligation grande que préférissiés ledit sieur de
31Pressins et quasi le missiés en jeu comme le recherchant
32d’en composer avec vous. Nous nous résolumes d’aller
33[v°] trouver la royne ; que monsieur d’Hourche reprendroit
34le propoz qu’il luy tint suivant voz lettres du Ve, luy feroit
35entendre les novelles que l’on avoit de l’estat dudit sieur Truchon
36et luy présenteroit votre lettre. Nous trouvâmes la royne à Saint-
37Tomas du Louvre à l’issue de sa messe. Monsieur d’Hourche
38s’acquitta fort bien de sa charge, remonstra à la royne
39suivant l’instruction dudit sieur Bellièvre que les estatz
40de présidantz ne se mettent poinct en taxe ; que le
41roy, vous accordant ce don[t] vous le requeriés, ne contrevenoit
42poinct à ses ordonnances sur le faict des offices et parties
43casuelles ; que, comme monsieur le tiers président Bellièvre
44entreroit au lieu de premier, duquel il estoit très
45digne, vous regarderiés aussi de nommer en sa place de
46tiers président quelque homme capable de telle charge ;
47voz services, despenses, attentes et fraische
48promesse de vous faire paroistre leur bonne volonté, la
49bonne occasion que s’en présentoit. Sur quoy la royne
50remit d’en parler au roy, devers lequel elle alla
51tout sur l’heure, de sorte que s’en est ensuivi don de l’office
52de premier président, advenant le décès de monsieur Truchon,
53à monsieur le président Bellièvre et don à vous de
54l’estat de tiers président pour en faire votre profit et y
55nommer l’homme capable. De quoy, à l’issue que la royne
56fit du cabinet du roy, elle advertit monsieur d’Hourche,
57qui estoit attendant, et le remit à monsieur
58Brulard, qui en avoit heu le commandement.
59Nous retournâmes après disner devers monsieur
60Bellièvre, où nous trovâmes monsieur le président des
61comptes Fléhard, avec lequel il fut d’advis que l’on
62commença à entrer en quelque traicté, attendant
63que monsieur le comte de Retz, qui avoit dict à monsieur
64[fol.50] Bellièvre qu’il se rendroit en son lougis pour négotier
65se faict en faveur de monsieur de Pressins, y arriva.
66L’offre de monsieur le président des comptes fut de huict mil
67livres, puys de neuf mil, puys de neuf mil cinq cens.
68Nous demandions douze mil, attendu qu’il y avoit XIIc
69livres de gaiges. En fin, on se rabaissa à dix mil l[ivres],
70luy ne voulant passer plus oultre, monsieur Bellièvre
71fut d’advis d’aller devers monsieur le comte de Retz, tant
72pour luy faire entendre que pour son respect vous
73estiés content de nommer ledit sieur de Pressins, qui d’ailleurs
74est très digne de telle charge, que pour ordonner de
75la finance qu’il vous en payeroit. Mondit sieur le
76comte, pour conclusion, pria monsieur d’Hourche d’accepter
77pour vous l’offre de IX m[ille] Vc livres pour l’amour de luy ;
78qu’il vous auroit obligation de tout ce que l’office valloit
79de plus, et qu’il s’employeroit en quelque bonne occasion
80envers le roy pour quelque bienfaict de plus grande importance
81pour la récompense de voz services. Voilà où le tout
82s’est résolu. Nous regarderons de parfaire le surplus
83si nous avons nouvelles que Dieu aye appellé à soy monsieur
84Truchon, que sera une perte très grande au roy et à sa
85justice, à vous monsieur, d’ung fidel et sage amy, à tous
86ceulx de la province où il présidoit pour la justice, et à
87moy d’ung fort bon segneur et bon amy. Son pauvre
88nepveu, qui est à monsieur le prince daulphin, est
89fort désolé. Il aura bien besoing de votre recommandation
90à l’endroit de mondit segneur son maistre.
91Je obliay le XIXe à vous escrire comment monsieur de
92Villeroy m’avoit mandé, sur une lettre que vous luy
93avez escritte de ce moys touchant le payement de votre
94estat de la présente année, il me dict à la verité
95[v°] que le trésorier Le Febvre pouvoit retarder votre
96payement pour se pendant s’ayder de voz deniers ; si m’a
97il dict et asseuré que vous toucherés argent pour
98la fin de ce moys de jullet. Je me plaignis à mondit sieur
99de Villeroy du retranchement de votre estat
100à II m[illes] livres pour an. Il me dict que la loy en estoit
101générale pour touttes les provinces, tant où il n’y a
102poinct d’assemblée d’estatz – où les lieutenantz généraulx
103puissent avoir quelque don hors l’estat du roy – que
104pour les autres. Je me obstinois en solicitations pour votre
105payement des années passées. Je m’en tayray, attendant
106scavoir ce que Dieu aura disposé de la vie de monsieur
107le président Truchon, et votre volonté àprès ce bien faict
108qui est en pur don.
109Ce matin, le roy est allé en Brye courir le cerf,
110la royne à Monceaux, attendre madame
111la duchesse de Lorrayne. La nouvelle est
112venue de la part du gouverneur de Guyse que
113le sieur de Jenlis et sa trouppe ont esté mis en
114pièces en lieu nommé Bossu, à trois lieues de
115Mons et de six lieues de Valenciennes. On tient
116que cela est pour toujours retenir le roy de ne
117se précipiter poinct en celle querelle. Mais la novelle est véritable.
118Nous n’avons pas heu voz lettres du IXe et néantmoins,
119le roy en a receu de vous du Xe, ausquelles et
120à celles du Ve, sa majesté faict response.
121Monsieur de Gargas et ses compagnons se portent bien, hors mis
122que l’ung se deurt de la petitte vérolle. J’estime que leur
123maistre vous escrit des novelles de votre filz. Je
124présente mes très humbles recommandations à votre bonne grâce.
125Monsegneur, je prie Dieu qui vous conserve en bonne
126santé et très longue vie. De Paris, ce XXIe jullet
1271572.
128Votre très humble serviteur
129S. de Boczosel